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Par Jenny Batlay

Les Rendez-vous de Paris« Les Rendez-vous de Paris » est le 27e film du célèbre réalisateur français Eric Rohmer, dont les célèbres « Contes moraux », « Comédies de proverbes » et « Contes des quatre saisons », entre autres, ont intrigué et été acclamés au cours des trente dernières années par les critiques littéraires, les jurys de cinéma et le public. Tout le monde a un Rohmer « préféré », et le mien est Pauline à la plage. La prédilection de Rohmer pour le rythme lent et les longs dialogues, dans des décors magnifiques où évoluent les protagonistes, appartenant pour la plupart à une certaine couche supérieure de la société, a parfois été critiquée comme étant « élitiste » ou ne s’adressant qu’aux préoccupations des « bourgeois » élégants, sophistiqués ou en vacances. Rohmer se délecte de ces moments d’oisiveté qui rendent possibles les aventures de l’esprit et du cœur. On a comparé le milieu représenté par Rohmer à celui de Woody Allen, mais alors qu’Allen met l’accent sur la maladresse comique vue par l’œil d’un « outsider », Rohmer est parfaitement à l’aise dans ce milieu de « beautiful people », ou « gens bien élevés », et l’atmosphère est donc harmonieuse. Contrairement à Allen, l’outsider comique, Rohmer est l’insider par excellence.

Dans « Les Rendez-vous », Rohmer a atteint une nouvelle hauteur d’où il peut voir les petites vagues provoquées par l’amour et ses intrigues. Les étrangers qui méconnaissent la France et utilisent des stéréotypes (tels que la gastronomie, la mode, le discours et l’amour) penseront que dans ce film, la seule préoccupation est l’amour (et, bien sûr, le discours sur l’amour). Comme s’il y avait autre chose ! Ce film le traite avec beaucoup de grâce en trois vignettes, plus intrigantes les unes que les autres, aussi légères et enivrantes qu’une flûte de Veuve Clicquot. Dans les trois vignettes, les filles se ressemblent étrangement dans leur « longiligne », leur sophistication aux cheveux longs. Nous les voyons se promener dans des paysages parisiens bien connus. Quel régal que cette visite des beaux parcs, des fontaines romantiques, et même une grande visite du Musée Picasso. Rohmer sait comment traiter ses invités, il nous montre ce que nous voulons voir depuis nos fauteuils, ce que nous désirons et fantasmons sur Paris, qui est incontestablement le chef-d’œuvre architectural du monde. Dans ce film (qui n’est pas un documentaire), le spectateur est invité à passer 100 minutes dans la vie d’une femme charmante.

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Duo Accordéon à ParisDans la première vignette, le « Seventh O’Clock Rendez-vous », une jeune femme, interprétée par Clara Bellar, prend progressivement conscience que son amant pourrait être infidèle – un dialogue à cœur ouvert à la Rohmer suit entre Clara et une amie. Lorsque nous rencontrons par inadvertance « l’autre » femme (qui est aussi spirituelle et délicieuse que les autres), rien de terrible ne se produit, bien sûr, il ne s’agit pas d’une attraction fatale. La jalousie ? Elle n’est qu’un pincement dans cette atmosphère de jeux légers où la bienséance est presque aussi pertinente que l’amour, mais un amour comme apprivoisé, bien élevé, aminci par l’observation lucide et le discours intellectuel. Le chagrin est vite avalé. Si finalement le tricheur est triché, c’est bien fait pour lui, et voilà !

La deuxième vignette, « Les bancs de Paris », est un duo ludique entre une étudiante et un professeur qui s’ébattent le long de plusieurs beaux sites touristiques parisiens. Le couple semble suivre les règles d’une version modernisée d’une certaine Carte du Tendre (ainsi que d’un plan de Paris) dans laquelle la dame n’accorde que les faveurs qu’elle souhaite : un baiser près d’une fontaine capricieusement choisie (et aucun baiser près d’une autre, ce qui serait considéré comme une « tromperie » envers l’homme avec lequel elle vit encore mais prévoit de partir un jour), une étreinte ici mais pas là. La chorégraphie de leurs jeux est apparemment spontanée, mais aussi calculée pour son effet sur le spectateur (il y a plusieurs niveaux de cinéma : le jeu que ce couple se donne, la performance pour le passant à l’intérieur du film, et pour le spectateur dans la salle). La démarche et l’attitude de la jeune fille sur ses jambes exquisément fines à talons hauts est une danse. Elle taquine, provoque et s’échappe avec grâce, sans jamais oublier son discours sérieux sur son comportement amoureux que son patient amant en attente, ou admirateur, tolère, non sans quelques commentaires spirituels qui montrent que, bien qu’il soit pris, il n’est pas dupe. Ces personnages sont-ils un peu narcissiques ? Peut-être, mais ils sont si légèrement égocentriques que nous sommes à la fois amusés et étonnés et que nous ne pouvons pas nous arrêter de regarder. Si le spectateur est fait pour être voyeur, ne vous attendez pas à des scènes érotiques, Dieu nous en préserve ! Ici, tout est en tout bien tout honneur et le charme de Rohmer est d’effleurer et de repartir aussitôt, à un rythme rapide comme le balancement d’une balançoire de Watteau. Ces parties de cache-cache sont le pendant moderne des marivaudages du XVIIIe siècle. Plus ça change, plus c’est la même chose.

Affiche Les rendez-vous de Paris

La dernière vignette diffère par sa formule : au début, il n’y a pas de relation amoureuse établie, et à la fin, il n’y a pas de rebondissement ironique. Un peintre insipide emmène une superbe visiteuse suédoise (et nous l’accompagnons) au musée Picasso, le préféré de tous, et rencontre au passage une nymphette française qu’il décide de suivre. La Suédoise est exactement ce à quoi les Français pensent qu’une Suédoise doit ressembler. Elle se promène dans les rues de Paris avec l’assurance de sa beauté blonde parfaite et fait des commentaires idiots sur l’art, ce qui prouve à quel point les Suédois sont superficiels ou, du moins, culturellement inférieurs. Elle est défavorablement comparée à la Parisienne, brillante et intelligente (et également belle), qui, bien sûr, a de la classe. Devant la Mère et l’Enfant de Picasso, la Suédoise commente en riant : « Ça, c’est un jambon, et ça, c’est un steak ». Pas de chérie : « Ceci est une mère, et cela est un enfant ». Devant une scène de foule dans l’atelier de l’artiste, elle éclate de rire : « Ces gens ont l’air de sortir d’un camp de concentration. Ah, ah, ah. Je n’aime pas ça ». C’est la phrase la plus controversée (la seule) du film. Nous, Français, sommes une nation verbale, nous sommes civilisés, nous intellectualisons. La Française que suit le peintre a toutes les qualités qui manquent à la Suédoise – un peu de chauvinisme dans ce stéréotype ? Pourtant, le mâle, comme dans les deux autres vignettes, sort bredouille. Dans ce film, l’occupation du mâle reste la chasse, mais la femelle disparaît toujours.

Duo accordéon musetteJ’ai énormément apprécié ce dernier Rohmer, peut-être parce que dans son apparente innocence, il ne parle pas vraiment de rien. Il parle de quelque chose, de l’art et de la beauté, du besoin de jouer et d’euphémiser, de la saveur et de l’arôme d’une société qui est peut-être en danger. Nous aimons Paris tel qu’il est et tel que Rohmer tente de le préserver pour les connaisseurs présents et futurs. Et tous ces jeux sophistiqués et lucides sur la nature insaisissable de l’amour, sur l’absorption de soi et un certain désir de « cesser le jour », cette douceur à la Wateau qui maquille les leçons amères de la vie, font des Rendez-vous de Paris un véritable joyau, un objet de collection, une incroyable légèreté de l’être.

Rendez-vous à Paris Avec Clara Bellar, Antoine Basier, Aurore Rauscher, Serge Renko, Michael Kraft, Benedicte Loyen. En français sous-titré en anglais. Durée : 100 minutes. Lincoln Plaza et Quad.

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